13 avril 1994 La renaissance du moulin. Nicolas Rebière

Au bord de la Gouaougue en pleine Chalosse baigne le moulin de Poyaller. Eden de verdure et hâvre d’histoire, on le visite pour ses biches et ses meules. Ouverture vendredi.
Un moulin au bord de la Gouaougue. Des propriétaires heureux d’y être et qui veulent y rester. Le décor est posé et les idées fourmillent.
Martine et Jean-Charles Birembaut ont acheté le moulin de Poyaller à la suite d’un gros coup de cœur et d’un bon coup de chance. Depuis, ces « Nordistes » sont devenus Chalossais. Histoire finalement classique dans cette région qui a vu naître bien des passions tardives de terroir.
Le couple a des projets plein la tête et regarde l’avenir par le bon bout de la lorgnette. « Nous sommes tombés amoureux de ce coin de Chalosse à la limite de Saint-Aubin et de Mugron (1) et voulons le faire découvrir à d’autres », avoue Martine.
A peine deux ans qu’ils sont là et ils ont déjà participé à la création de deux associations, les Amis des moulins des Landes et la Chalosse fantastique, rêve ambitieux pour l’instant en sommeil.
Leur moulin accapare le reste de leur temps. Jean-Charles est allé dans le Gers et jusqu’au Luxembourg pour visiter des élevages de biches et a implanté une famille entière de cervidés sur 4 hectares traversés par le canal de dérivation du moulin.
Sa femme s’est lancée à corps perdu dans l’histoire de son moulin, et du quartier de Poyaller par la même occasion. « II a beaucoup compté au fil des siècles. Aux alentours de 1200, le quartier accueillait • le château du baron Arnaud III, qui possédait Saint-Aubin, Mugron, Montaut et d’autres hameaux. On trouvait à Poyaller des juges, un chirurgien et un moulin, voire deux. Or les meuniers étaient des notables à l’époque ».

DE « L’ILIADE » A «FAUST» .
Au détour des pages, des grimoires et monographies qu’elle a consultés, Martine Birembaut a également découvert une légende sur le fameux Arnaud III, un conte qui emprunte aussi bien à « l’Iliade » qu’à « Faust ».
II reste même un mur de soutènement qui daterait du XIII’ siècle et serait bâti des mêmes pierres qui constituent la tour cachée dans les bois, dernier vestige du château d’Arnaud III, racheté plus tard par la prestigieuse famille périgourdine des Gonthau-Biron.
« Je ne peux cependant pas affirmer que notre moulin s’est construit au Moyen Age, les premiers docu-ments en faisant état remontent au XVIé », reconnaît-elle.
Mais l’histoire ne s’arrête pas là. Jusqu’en 1952, on a connu un meunier à Poyaller. Puis quelques instal-lations légèrement plus industrielles (notamment des élévateurs à godets) ont transformé l’établissement en minoterie qui a fonctionné jusqu’en 1963.
Ce sont les étapes de la transformation du grain en farine qui sont décrites au cours d’une visite exhaustive. On découvre les systèmes alambiqués de nettoyage de grain et le principe en revanche limpide de broyage du blé ou de piquage des meules.
On pourra peut-être même revivre ce procédé de fabrication de la farine à l’ancienne. « J’essaie de re-faire fonctionner le moulin, explique Jean-Charles, mais les fortes pluies de ces derniers jours ont retardé les travaux. »
En attendant, on peut imaginer devant ces mécanismes tout de bois les gestes séculaires que les meuniers ont répétés sans rechigner chaque jour de l’année. « La chanson « Meunier tu dors » n’est pas très représentative de leur vie à l’époque. Il fallait surveiller en permanence le système qui risquait de prendre feu s’il tournait à vide », précise la guide.
A côté de cette découverte des gestes séculaires des meuniers, les visiteurs pourront également s’initier au rythme de vie des cerfs et biches au fil des saisons. En ce moment, les mâles (un cerf et deux daguets) se font les cornes et les femelles (au nombre de vingt sont pleines. En attendant la naissance des faons, puis le rut, les visiteurs pourront se rendre au moulin dès vendredi.

13 juillet 1994 Faut y aller à Poyaller. Lydie Larrodé

« Encore une histoire, Martine ! »
Les enfants de l’école ont, comme chaque année, fait un voyage scolaire.
Destination ensoleillée : le moulin de Poyaller, tout près de Mugron, sur la commune de Saint-Aubin.
Accueil des plus sympathiques par des hôtes charmants et très disponibles, Jean-Charles et Martine.
Après un agréable jus d’orange de bienvenue, la visite du moulin peut commencer. Martine commente : la construction et la mise en route du moulin passionnent tous les élèves. «.Surtout qu’on l’a fait tourner, le moulin ! » Puis viennent les explications de Jean-Charles sur les cerfs, les biches et, les faons. « II y en avait beaucoup ! On leur a donné à manger, ils aiment le maïs. » « On sait comment trouver l’âge du cerf avec les bois. »
II y a aussi la visite de la tour et de la chapelle où l’on enterrait des personnalités et les histoires racontées par les hôtes, et le jus d’orange encore, avant de quitter le moulin. Que de choses à raconter aux parents !
Une belle journée très enrichissante à insérer dans l’album des souvenirs.

Quel âge ? 4,5 ans ? (Photos Lydie Larrodé, studio Raymond, Dax)

4 avril 1995 Une reconversion au Sud

Des Lillois descendus dans les Landes sont devenus éleveurs de biches.
« Si vous n’allez pas au-devant des gens, ils ne viendront pas vers vous. Avec de la volonté, on peut réussir ; pas besoin de millions !», déclare Martine Birembaut, propriétaire d’un élevage de biches.
Lorsqu’en août 1991, Jean-Charles Birembaut arrive dans les Landes, il a laissé derrière lui, à Lille, un emploi de responsable de production en phytosanitaires. Il se retrouve donc au chô-mage. Il s’installe près de Saint-Aubin, car sa femme Martine a trouvé un poste de directrice de centre de vacances non loin de là. Et puis aussi parce qu’ils aiment cette région, où ils viennent fréquemment passer leurs congés, accompagnés de leurs deux enfants. Cet ingénieur agricole de formation s’investit dans de nombreuses associations et trouve même un travail… qui ne dure que trois mois.
Retour à la case départ.
« C’est à partir de ce moment-là, que l’idée de créer ma propre entreprise a germé dans mon esprit. Tout s’est enchaîné lorsque nous avons trouvé ce moulin situé sur un cours d’eau au milieu d’une parcelle de 6 ha», se souvient Jean-Charles Birembaut. Sur ce terrain paradisiaque, ces ex-Lillois veulent créer leur éden : un élevage de biches sur une propriété où l’on pourrait visiter le moulin et se promener en barque. Décidé à réaliser son rêve, le couple vend l’immeuble qu’il possède à Lille et souscrit un prêt de 300.000F. Le moulin de Poyaller leur appartient, ainsi que les 6 ha environnants. « Il a fallu clôturer tout autour pour pouvoir accueillir les huit biches pleines, et le cerf que nous avons reçus en avril 1992. Nous les avions commandés à un éleveur gersois qui les a directement faits venir d’Ecosse », explique Martine Birembaut.
Le troupeau grossit, jusqu’à atteindre le maximum de trente-six têtes l’hiver dernier. En dé-cembre, Martine a démissionné pour se consacrer entièrement aux biches. La visite du « com-plexe » (élevage et moulin) des Birembaut coûte 20F pour les adultes et 10 F pour les enfants. Mais ce n’est pas l’unique ressource du couple. « Bien que notre idée première était unique-ment basée sur les visites, nous nous sommes rapidement rendus compte qu’il fallait vendre de la viande. L’hiver dernier nous avons donc vendu six bêtes. La viande de cerf est très recherchée pour ses qualités diététiques ». Ajouté au cinq mille cinq cents visiteurs, le chiffre d’affaires 1994 des Birembaut a été de 150.000 F. Le couple espère dix mille curieux pour cette saison qui a débuté le 19 mars. « Nous espérons acquérir le Statut de société commerciale; ma femme pourra ainsi être em-ployée par l’entreprise. J’aimerais réparer le moulin afin qu’il puisse fonctionner comme avant. Mais ce ne sont que des projets, il faut avancer petit à petit». Rien ne « cerf » de courir…

Avril 1995 BAMBYLAND dans les LANDES

« Le cheptel et le moulin attirent plus de 5.000 visiteurs par an. A terme, 8.000 sont attendus ».
Ne trouvant pas d’emploi, six mois après avoir rejoint sa femme dans les Landes, un ingénieur agricole s’est décidé à créer le sien. Originaire de la région lilloise, ancien responsable de production en phytosanitaires, Jean-Charles BIREMBAUT est aujourd’hui à la tête d’un élevage d’une trentaine de biches, que l’on vient visiter des quatre coins du département. Tout commence lorsque le couple tombe sous le charme d’un domaine de cinq hectares, avec moulin et cours d’eau, près de Saint-Aubin (Landes). Voilà pour la carte postale.

Un million de francs pour l’acquisition et un emprunt de 300 KF pour restaurer le moulin et ceindre la propriété de grillages, Jean-Charles est prêt en Avril 92 pour recevoir huit biches pleines et un cerf en provenance d’Ecosse. Avec 100% de réussite en reproduction et seulement 15.000 F de fourrage et de soins vétérinaires par an, le troupeau grossit rapidement. D’Avril à Novembre 1994, pas moins de 5250 visiteurs sont venus s’attendrir devant les jeunes faons et ont découvert les mécanismes restaurés du moulin. A côté de l’aire de pique-nique, deux barques permettent de se promener sur la rivière. Une réussite plus personnelle que financière : 150 KF de CA la première année, le double espéré en 1995, on est loin de l’Eldorado dont rêvent certains créateurs d’entreprises.

Jean-Charles BIREMBAUT n’en a cure et préfère étaler ses investissements sur plusieurs années, ne doutant pas de son produit écolo-touristique. En changeant de région, il voulait changer de vie, c’est chose faite. Il compte maintenant sur les curistes de Dax et les scolaires pour poursuivre son installation…

17 juin 1995 Les faons de Poyaller,Hervé Chassain

NATURE

Dans les collines de Chalosse, la famille Birembaut fait visiter son élevage de biches et de cerfs. Avec en vedette les petits faons qui viennent de naître. Ils n’ont pas les yeux aussi grands que le fameux faon de Walt Disney, mais tous les enfants qui passent ici n’ont qu’un nom pour les désigner : Bambi ! Sur leurs jambes flageolantes ils serrent de près leurs biches de mère, craintifs de ce monde où ils viennent d’arriver depuis quelques jours. Ils ne les abandonnent que lorsque celles-ci, déjà en partie apprivoisées, s’approchent des grillages pour recevoir caresses et poignées de grains des visiteurs.
Dans le domaine cloturé de six hectares du moulin de Poyaller, Jean-Charles et Martine Birembaut ont en effet créé un élevage à double fonction. Les cervidés sont un attrait touristique, faciles à approcher dans le parc de vision. Et ils sont également destinés à fournir de la viande, par nécessité économique. « Je suis malade chaque fois qu’il faut en faire abattre », se désole Jean-Charles.

LA BICHE CAROLINE

Cet ingénieur agricole a quitté son Nord natal pour venir s’installer ici. Pour bien se préparer, il a visité plusieurs élevages similaires en Bretagne et en Belgique. Il lui a aussi fallu vaincre de nombreux obstacles administratifs pour pouvoir faire visiter cet élevage particulier au public.
Depuis trois ans, il s’est lancé dans l’aventure avec huit biches et un mâle venu d’Écosse. Ce dernier, baptisé Gaétan, a dû être remplacé récemment. Il était devenu dangereux car trop familier de l’homme et devenait trop agressif à l’époque du rut, à l’automne. Les biches sont, à l’inverse, très douces, à l’image de Caroline, la plus familière du troupeau.
Aujourd’hui, le troupeau comporte vingt-six bêtes. Il s’agrandit en ce moment avec la naissance des faons. Six sont nés ces derniers jours et d’autres biches vont bientôt mettre bas. Le propriétaire met parfois plusieurs jours avant de se rendre compte des naissances, puisque les faons vont se cacher dans les fourrés. La visite de l’élevage est aussi complétée par celle du moulin à eau et par des promenades en barques sur le ruisseau.

LA VIANDE DE CERF

 » Poy, poy, poy, poy « , Jean-Claude a une manière bien à lui d’appeler les bêtes. Et ça marche, puisque biches et faons accourent. De quoi offrir de belles images de nature aux amateurs de safari, sans passer de longues heures à l’affût. Le nouveau cerf, encore sauvage, reste à l’écart, assez méfiant, mais les biches viennent presque manger dans la main.
Des classes entières viennent ici prendre une leçon de chose grandeur nature, y entendre les biches raire ou réer (et y apprendre ce mot), découvrir que les cerfs ne portent pas des cornes mais des bois sur la tête et se désoler un peu que l’on finisse par devoir manger ces bêtes si gentilles.
La viande de cerf est très fine, deux fois moins grasse que celle du boeuf. Jean-Charles n’ayant pas trouvé de débouchés extérieurs (à cause de la concurrence du chevreuil), vend tout sur place en conserves. Les gastronomes apprécient, mais les amoureux de la nature préfèrent plutôt ramener de belles photos comme souvenir.

Moulin de Poyaller, 40250 Saint-Aubin. Tél.58.97.95.72. Ouvert de mars à octobre, tous les jours. Visites guidées à 10 h 30, 14 h 30 et 17 heures.

Illustrations : Des écoles viennent ici prendre une leçon de chose grandeur nature ; Des biches familières accompagnées de leurs faons timides. (Photos Jean-Louis Duzert)

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